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Les cairns de la Serre du Buis

Lorsque l'on monte depuis la Combe de Remiols sur le plateau qui la domine au Sud on est surpris d'y trouver sept cairns coniques.

Si l'on emprunte la piste qui depuis les Correts conduit à la Serre du Buis on croise également une série de cairns qui descendent vers le vallon de la Serre de la Garrigue.

L'intuition que ces deux ensembles pouvaient être liés, nous a conduit à explorer ce territoire en montant depuis le Cortal des Arques jusqu'à la lisière de la Combe de Remiols.

Nous avons ainsi recensé trente deux ouvrages entre, au Sud, un enclos situé sous le point coté 194 dans la Serre de la Garrigue et au Nord, le bord du plateau dominant la Combe de Remiols.

Parmi ces trente deux ouvrages :

Caractéristiques des cairns

La forme

Les vingt quatre cairns intacts ont des formes coniques ou proches du cône. Nous avons identifié cinq types de silhouette représentés et comptabilisés ci-dessous.

CôneTronc
de cône
Tronc de PyramidePain
de Sucre
Cylindre
13 exemplaires 5 exemplaires 3 exemplaires 2 exemplaires 1 exemplaire

La taille

Leurs hauteurs s'échelonnent de 1 mètres à 2,20 mètres et neuf d'entres eux ont une hauteur de 1,80 ou plus ce qui laisse supposer que leur édification n'a pu se faire sans l'aide d'un petit échafaudage.

Les Cairns et le territoire

Patience, la carte peut être un peu longue à charger.
Le survol d'un point avec le curseur fait apparaitre une vignette de l'ouvrage survolé, sa fiche est consultable par un clic sur la vignette.
Le survol des enclos, signalés en rose, fait apparaitre une photo mais ces enclos ne font pas l'objet de fiches.

Répartition spatiale
Sur les vingt neuf cairns, dix neuf dessinent une ligne sineuse, d'une longueur de un kilomètre qui commence, au Nord, au cairn E4-10 et s'achève, au Sud, au Cairn E4-40, à 17 mètres de l'angle Nord Ouest de l'enclos Sud. Soit un interval moyen de 56 mètres entre chaque cairn.
L'orientation est environ Nord-Nord-Est/Sud-Sud-Ouest (190°).
Les dix autres cairns et les trois autres ouvrages sont répartis, sans ordre apparent, jusqu'à 270 mètres à l'Ouest (E4-17) et à 300 mètres à l'Est (E4-41) de cette "colonne vertébrale".

Essais d'Interprétation

Relations avec des limites administratives
Les 32 ouvrages sont répartis sur deux grandes parcelles, qui doivent être des parcelles communales, la 000D533 au Nord (81,4 Ha) et la 000D122 au Sud (115,9 Ha). Leurs implantations ne coïncident pas du tout avec les limites de ces parcelles, ils n'ont donc pas un rôle de marquage du parcellaire.
À la différence de la Croix des Trois Seigneurs située sur la limite des territoires d'Opoul et de Feuilla ou des bornes que l'on trouve entre Belesta et Montalba dans les Pyrénées-Orientales, ces cairns n'ont rien à voir non plus avec l'ancienne frontière franco-aragonaise, dont le tracé qui coïncide à peu près avec la limite départementale Aude/Pyrénées-Orientales, passe à 500 mètres au Sud du cairn E4-40 suivant une direction Sud-Est/Nord-Ouest.
Mais à défaut de parcellaire, on pourrait penser à des éleveurs rivaux qui auraient voulu, en faisant assaut de monumentalité, borner la "frontière" entre leurs deux territoires de paturages.
Relations avec les enclos
Le plateau de la Serre du Buis est majoritairement formé d'un lapiaz calcaire plus propice à l'élevage qu'à la culture et les vestiges d'abris (arrucadors) contre le vent de Cers témoignent d'un ancien usage pastoral.
Cependant, quelques enclos isolés semblent avoir été défrichés à des fins agricoles. La ligne des cairns parait associée à trois de ces enclos, surlignés en rose sur la carte Ign.
La ligne des cairns commence au cairn E4-10, au Nord de l'enclos 1, qu'elle contourne par l'Est.
La ligne matérialisée par les cairns E4-24, E4-25 et E4-26 passe ensuite à une cinquantaine de mètres à l'Est de l'enclos 2. Sur les photos aériennes anciennes, la piste de la Serre du Buis passait au Sud de l'enclos 2, non au centre de celui-ci, comme actuellement.
L'enclos 2 montre sur la photo aérienne d'évidentes traces de sillons, probablement de vignes, orientés Nord-Est/Sud-Ouest.
Notons enfin que l'ouvrage E4-26, une sorte de tumulus ponctué par deux pierres dressées qui évoque une sépulture (consultez la fiche), est intégré dans le talus Ouest de l'enclos 2.
La ligne des cairns s'achève au cairn E4-40, à une quinzaine de mètres de l'angle au Nord-Ouest de l'enclos 3 et on n'observe plus de cairn au Sud de celui-ci.

Matérialisation d'un itinéraire?
On pourrait penser que les dix neuf cairns balisent un itinéraire entre les trois enclos qu'ils semblent relier.
De fait depuis la piste de la Serre du Buis, l'enfilade des cairns que l'on aperçoit indique une direction. Et en progressant de cairn en cairn vers le sud, on arrive à l'enclos 3.
Mais cet itinéraire si il est le plus direct n'est pas le plus confortable. En effet les cairns sont édifiés sur du lapiaz, probablement pour des raisons de stabilité, et la progression sur les arêtes de calcaire est pénible et parfois dangereuse.
On distingue au contraire sur le terrain ainsi que sur les photos aériennes des sentiers qui empruntent des vallons caillouteux où la marche est plus aisée. Sur la photo Google ci-contre le sentier parallèle à la ligne de cairns a été surligné en blanc.
Par ailleurs, même s'il tend, depuis quelques années, à se refermer au Nord de la piste de la Serre du Buis, le paysage qui reste encore très ouvert, apparait peu boisé sur les photos aériennes antérieures aux années 1970. Il n'est pas actuellement difficile de s'y orienter, il l'était certainement encore moins à la fin du XIXéme siècle.
Le site fréquemment balayé par le vent de Cers n'est pas non plus exposé aux brouillards comme dans certaines zones montagneuses.
Le balisage d'un éventuel itinéraire par des ouvrages aussi nombreux et aussi monumentaux ne parait pas vraiment justifié.
Oeuvres de bergers poètes?
Si les interprétations fonctionalistes ne sont pas pleinement convaincantes, on peut aussi penser à un type d'intervention moins rationnelle. Un ou plusieurs bergers poètes pourraient s'être donné le mot pour réaliser année après année des édifices témoignant de leurs séjours dans la garrigue.

Ainsi dans le massif de l'Albera, le fameux Manel Costa, berger de Sant Martí de l'Albera a réalisé de 1862 à 1908, soit pendant 46 ans, de petites sculptures, les aménagements de plusieurs sources (La font d'en Manel, la reyna de les fonts) et même une tour en pierres sèches de plus de 4 mètres de haut au sommet du Puig Neulos.

Post Scriptum
L'insuffisance de nos connaissances en astronomie alliée au manque de précision de mon GPS de randonnée, ne nous ont pas permis de repérer d'alignements significatifs. Nous ne sommes ni à Carnac ni à Stonehenge.
Mais il n'est pas exclu que des ufologues chevronnés et équipés de matériels performants ne découvrent un jour le sens caché de cet ensemble. Car après tout, nous ne sommes pas très loin... de Bugarach.

Quel Avenir?

L'avenir est très incertain pour cet ensemble presque entièrement situé, à l'exception de deux cairns, dans le fuseau d'étude de la ligne TGV Montpellier-Perpignan, la zone grisée sur le plan ci-contre.

Un petit espoir, le tracé retenu, la ligne jaune et rouge, passe légèrement au Sud de l'ensemble.

À visiter rapidement avant destruction partielle.

Mise à jour : 19/03/2016